LettreHenri Poincaré à Gösta Mittag-Leffler - 30 septembre 1884

Nancy 30/9 841

Mon cher ami

Je viens de recevoir de Mme Kowalevski une aimable lettre2 où elle me demande si je pourrais envoyer aux Acta le développement de ma dernière note des Comptes Rendus.3 Cela est facile / et je vous l’enverrai dès mon retour à Paris.4

J’ai écrit il y a quelque temps à M. Richard Kaufmann pour lui demander dans quelles conditions il désirerait que je fasse la biographie de Mme Kowalevski.5 Mais je n’ai pas encore reçu de réponse.

A vous sincèrement

Poincaré


Apparat critique

  1. Nancy-30 septembre — Stockholm-4 octobre

    La réponse de Poincaré, datée du 14 septembre 1884, à la lettre de Kovalevskaia dont il est question dans cette lettre, est référenciée à l’Institut Mittag-Leffler sous la cote IML Poincaré 22.

  2. La dernière note aux Comptes rendus (1884), (1934, 1–3) de Poincaré, dans laquelle il se proposait de généraliser les théorèmes de Fuchs Sur les classes d’équations différentielles dont toutes les intégrales particulières ont les mêmes points singuliers (1884), avait soulevé l’enthousiasme de Mittag-Leffler :

    A propos de ces dernières équations [différentielles ordinaires linéaires], comme la note de Poincaré dans les Comptes rendus est belle. Il a battu Fuchs encore une fois. Quel génie pour tout que Poincaré. (Lettre de Mittag-Leffler à Hermite datée du 3 août 1884 — AS)

    Néanmoins, dans sa lettre du 25 septembre 1884, Kovalevskaia fait part à Poincaré de ses difficultés et de celles de Mittag-Leffler à comprendre sa démarche :

    Nous avons lu avec grand intérêt votre note dans les Comptes Rendus concernant le mémoire de Fuchs sur les équations différentielles jouissant de la même propriété fondamentale que les équations différentielles linéaires ; mais je dois avouer que nous ne sommes point parvenus à bien saisir votre démonstration. Monsieur Leffler me charge de vous demander en son nom si vous ne voulez point avoir l’obligeance de rédiger la remarque intéressante que vous avez faite d’une manière un peu plus détaillée et de la lui envoyer pour les Acta. Dugac (1989, 143)

    Cette note avait en effet, suscité la perplexité de Fuchs et de Hermite comme le montre la lettre adressée par ce dernier à Mittag-Leffler le 2 septembre 1884 :

    A propos de Poincaré, voici, sous le sceau du secret, ce que vient de m’écrire M. Fuchs, et bien certainement avec le désir que j’intervienne, ce que je tâcherai de faire : D’abord je ne comprends pas pourquoi M. Poincaré dit que les équations différentielles traitées par moi n’ont qu’un nombre fini de points singuliers. En effet, je n’ai pas fait la supposition que les coefficients dans l’équation algébrique entre \(y\) et \(dy/dz\) dépendent aussi algébriquement de la variable indépendante \(z\). Puis je ne comprends pas du tout la conclusion faite par Poincaré pour p > 1, p. 77 des Comptes Rendus. Cette conclusion est le point capital, n’est-ce pas, et il me semble bien impossible que Poincaré ait fait erreur ; pourriez vous me donner là-dessus votre avis dont je tirerai parti pour ma médiation ? Dugac (1985, 92–93)

    Dans sa réponse datée du 13 octobre 1884, Mittag-Leffler exprime son point de vue sur la question en précisant que si Fuchs a raison de dire qu’il traite un cas général, le cas particulier étudié par Poincaré est le seul intéressant :

    Quant aux remarques de M. Fuchs envers M. Poincaré, je trouve qu’il a raison quand il dit qu’il n’a pas fait la supposition que les coefficients dans l’équation algébrique entre \(y\) et \(dy/dz\) dépendent aussi algébriquement de la variable indépendante \(z\). Et pourtant M. Poincaré doit avoir raison, parce que le cas qu’il regarde est le plus intéressant. Sans faire la restriction de M. Poincaré, on rentre dans une généralité qui ne sert pas à grand chose. Vous voyez que je regarde maintenant M. Fuchs du point de vue français. Quand M. Fuchs dit qu’il ne comprend pas du tout les conclusions de M. Poincaré pour \(p > 1\), je trouve cela fort naturel. Je n’ai pas non plus compris M. Poincaré très longtemps et il s’est exprimé réellement d’une manière très obscure. Je ne tâcherai pas maintenant de vous développer plus en détail sa pensée. Je lui ai écrit, en lui demandant de vouloir bien m’envoyer une rédaction plus détaillée et plus claire pour les Acta, et je vous enverrai en Juin un tiré à part. (AS)

  3. Poincaré (1884), (1934, 1–3)

  4. Poincaré (1885), (1934, 4–31).

  5. Voir lettres n°41, 42 et 43.


Références

Drach, Jules, ed. 1934. Œuvres d’Henri Poincaré, Volume 3. Paris: Gauthier-Villars.

Dugac, Pierre. 1985. “Lettres de Charles Hermite à Gösta Mittag-Leffler (1884–1891).” Cahiers Du Séminaire d’histoire Des Mathématiques 6: 79–217.

———. 1989. “Henri Poincaré, la correspondance avec des mathématiciens (de J à Z).” Cahiers Du Séminaire d’histoire Des Mathématiques 10: 83–229.

Fuchs, Lazarus. 1884. “Über Differentialgleichungen, deren Integrale feste Verzweigungspunkte besitzen.” Sitzungsberichte Der Königlich Preussischen Akademie Der Wissenschaften Zu Berlin, 699–710.

Poincaré, Henri. 1884. “Sur un théorème de M. Fuchs.” Comptes Rendus Hebdomadaires Des Séances de L’Académie Des Sciences de Paris 99 (2): 75–77.

———. 1885. “Sur un théorème de M. Fuchs.” Acta Mathematica 7 (1): 1–32.

Titre
Henri Poincaré à Gösta Mittag-Leffler - 30 septembre 1884
Incipit
Je viens de recevoir de Mme Kowalevski une aimable lettre ...
Date
1884-09-30
Lieu
Paris
Lieu d’archivage
Mittag-Leffler Institute
Type
fr Lettre autographe signée
Section (dans le livre)
44
Nombre de pages
2
Langue
fr
Publié sous la référence
CHP 1:44
Licence
CC BY-ND 4.0

« Henri Poincaré à Gösta Mittag-Leffler - 30 Septembre 1884 ». La Correspondance Entre Henri Poincaré Et Gösta Mittag-Leffler. Archives Henri Poincaré, s. d, Archives Henri Poincaré, s. d, La correspondance d'Henri Poincaré, consulté le 16 avril 2024, https://henripoincare.fr/s/Correspondance/item/6000