LettreHenri Poincaré à Aline Boutroux - 29 novembre 1873
[29 novembre 1873]
Ma bonne Liline,
J’ai eu 20 hier en Méca ; j’ai trouvé le bontoto1 dans son lit à 7 h ¾. Nous avons déjeûné puis nous avons été chez les Rinck où papa a refusé à déjeuner et à dîner ; de là chez Mme Valette, absente, chez les Olleris, absents, puis nous avons déjeuné. Nous sommes repartis pour chez Luys2 qui a exhibé à papa son médecin adjoint et ses appareils de coupe microscopique ; il a esquinté Beaunis, Coze, Émile Parisot etc etc.3, avec l’approbation de papa et du médecin adjoint. De là nous sommes allés chez les O. Kerrins4 ; nous avons rencontré en chemin Biel avec sa sœur et son père. M. O. Kerrins m’a invité à déjeuner pour dimanche. Nous allons aller chez M. Lecomte5, puis nous irons probablement à la Gaîté6. Au revoir ma bonne Liline,
Henri7
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Bon toto était sans doute le surnom familial du père d’Henri Poincaré. Le surnom familial de Poincaré était sans doute Toto, celui de sa sœur Liline et celui d’Eugénie Poincaré Bonne nonotte. Voir la note 7 à la fin de cette lettre.↩
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Jules Bernard Luys était médecin des hôpitaux de Paris, en poste à l’Hôpital de la charité, et s’était fait connaître pour ses recherches en neuroanatomie, pathologie cérébrale et hypnotisme. De par la nature de ses travaux, on comprend les relations qu’il entretenait avec le père de Poincaré, lui-même auteur d’un ouvrage sur la physiologie du système nerveux [É.-L. Poincaré 1873-1874].↩
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Poincaré se fait sans doute ici l’écho des tensions qui accompagnèrent le transfèrement de la Faculté de médecine de Strasbourg vers Nancy en 1872, après l’annexion allemande. Alors qu’il avait été au premier plan dans ce processus et bien qu’il pût se targuer d’une grande ancienneté en tant qu’enseignant à l’École préparatoire de médecine de Nancy (de 1858 à 1872), le père de Poincaré n’était pas parvenu à obtenir une chaire dans la nouvelle faculté et il était demeuré professeur-adjoint. Henri-Étienne Beaunis avait obtenu la chaire de physiologie, Léon Coze celle de matière médicale et thérapeutique et Victor Émile Parisot avait quant lui conservé la chaire de clinique dont il était déjà titulaire à l’école de médecine. Émile-Léon Poincaré n’obtint la chaire d’hygiène qu’en 1880. Dans ses souvenirs, Aline Boutroux évoque l’amertume familiale causée par cet événement : « L’antique faculté de médecine de Strasbourg fut transférée à Nancy en bloc, ce qui devait avoir sur la carrière médicale de papa une influence considérable. La modeste école de médecine à laquelle appartenait papa depuis longtemps déjà s’effaçait devant la grande faculté, et son pauvre personnel se voyait refoulé ou supprimé. On avait promis, toutefois, de donner aux nancéiens deux ou trois chaires qui seraient attribuées aux professeurs les plus distingués. Mais, au dernier moment, la chaire promise à papa fut donnée à un strasbourgeois et papa fut nommé, comme la plupart de ses anciens collègues, professeur adjoint. C’était un titre inférieur, destiné à s’éteindre au fur et à mesure que ceux qui le recevaient pourraient être mis à la retraite. » [A. Boutroux 2012, chap. XVI].↩
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Les références à quelques membres d’une famille O’Kerrins reviennent à plusieurs reprises sous la plume de Poincaré. ↩
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S’agit-il d’un cousin éloigné ? On trouve dans l’arbre généalogique de la famille Poincaré la trace d’un mariage entre Joseph Hyacinthe Poincaré et Jeanne Antoinette Lecomte .↩
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La Gaîté : théâtre de la Gaîté.↩
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Au verso de cette lettre on trouve une courte lettre de Léon Poincaré à son épouse et à la sœur de Poincaré – « Bonne nonotte et Bonne Liline, le toto est bien gentil. Il a dû s’embêter chez Luys parce qu’il m’a retenu longtemps. Temps affreux. Nous barbottons. Poincaré ».↩
- Titre
- Henri Poincaré à Aline Boutroux - 29 novembre 1873
- Incipit
- J'ai eu 20 hier en Méca ...
- Date
- 1873-11-29
- Expéditeur
- Poincaré, Henri (1854-1912)
- Destinataire
- Poincaré, Aline (1856-1919)
- Identifiant
- L1873-11-29-HP_AP
- Adresse
- Nancy
- Lieu
- Paris
- Sujet
- fr Colles et examens (polytechnique)
- fr Visites familiales et amicales
- fr Théâtre et opéra
- Lieu d’archivage
- Private collection 75017
- Type
- fr Lettre autographe signée
- Section (dans le livre)
- 1
- Droits
- Archives Henri Poincaré
- Nombre de pages
- 2
- Transcription de
- Lettre H. Poincaré to Aline Poincaré (1/1)
- Est une partie de
- La correspondance de jeunesse d'Henri Poincaré : les années de formation, de l'École polytechnique à l'École des mines (1873-1878)
- Noms cités
- John O'Kerrins-Hyde
- Poincaré, Aline (1856-1919)
- Poincaré, Émile-Léon (1828-1892)
- Famille Rinck
- Mme Valette
- Famille Olleris
- Jules Bernard Luys
- Henri-Étienne Beaunis
- Léon Coze
- Victor Émile Parisot
- Famille O’Kerrins
- Biel
- Noms cités dans l'apparat
- Poincaré, Henri (1854-1912)
- Poincaré, Aline (1856-1919)
- Launois, Eugénie (1830-1897)
- Poincaré, Émile-Léon (1828-1892)
- Henri-Étienne Beaunis
- Léon Coze
- Victor Émile Parisot
- Jeanne Antoinette Lecomte
- Joseph Hyacinthe Poincaré
- Jules Bernard Luys
- Références Bibliographiques citées dans l'apparat
- Leçons sur la physiologie normale et pathologique du système nerveux, deux volumes
- Vingt ans de ma vie, simple vérité... La jeunesse d'Henri Poincaré racontée par sa sœur (1854-1878) - Texte inédit édité par Laurent Rollet
- Numéro
- 010
- Langue
- fr
- Licence
- CC BY-ND 4.0
« Henri Poincaré à Aline Boutroux - 29 Novembre 1873 ». La Correspondance De Jeunesse d’Henri Poincaré : Les années De Formation, De l’École Polytechnique à l’École Des Mines (1873-1878). Archives Henri Poincaré, s. d, Archives Henri Poincaré, s. d, La correspondance d'Henri Poincaré, consulté le 24 avril 2024, https://henripoincare.fr/s/Correspondance/item/7555