RapportH. Poincaré: Rapport sur la thèse de Fayet



H. Poincaré: Rapport sur la thèse de Fayet

27 juin 1906

La plupart des comètes connues ont une orbite parabolique ou elliptique qui montre que ces astres appartiennent au système Solaire. Il y a cependant quelques exceptions apparentes. M. Fayet s’est préoccupé de les discuter. Il s’est demandé si la nature hyperbolique des orbites était primitive ou si ces orbites n’étaient devenues hyperboliques que par l’effet des perturbations. Cela exigeait de très longs calculs, puisqu’il y avait à examiner 150 comètes; l’auteur a imaginé une méthode expéditive qui lui a permis de venir à bout de ce travail.11Fayet a souligné la difficulté du calcul dans ces termes : Malheureusement, pour effectuer un tel travail, par quadratures mécaniques, avec toute la rigueur possible et en tenant compte de l’action de toutes les planètes, on viendrait se heurter à une grosse difficulté matérielle: un calculateur, même très exercé, ne pourrait achever les calculs relatifs aux 150 astres qu’il s’agit d’étudier, en moins de longues années. (Fayet 1906, 3)

Pour cela il partage l’orbite de la comète en plusieurs régions ; après avoir traité à part les termes qui proviennent de la partie complémentaire de la fonction perturbatrice et dont l’intégration est plus facile. Dans la région la plus éloignée, l’effet des perturbations, dont M. Fayet donne une limite supérieure, est négligeable, dans la région suivante, la fonction sous le signe peut être avec une approximation suffisante, être mise sous la forme rationnelle ; enfin dans la 3e région, voisine de l’époque où la distance est maximum, on peut simplifier le calcul en négligeant l’excentricité de Jupiter.

L’application de cette méthode a montré à M. Fayet que pour la plupart des comètes en question, la nature hyperbolique était due à l’action de Jupiter et que ces orbites étaient primitivement elliptiques ou paraboliques. Pour 4 d’entre elles, cependant le résultat était assez incertain pour qu’un calcul plus exact devînt nécessaire. Le calcul a alors été recommencé par quadratures mécaniques et en tenant compte des perturbations dues aux planètes supérieures ce calcul a montré que 3 d’entre elles étaient primitivement elliptiques. Une seule restait dont l’orbite semblait notablement hyperbolique. M. Fayet a repris les calculs de détermination de l’orbite faits autrefois par Bond ; et il y a retrouvé des erreurs de calcul et une application incorrecte de la méthode des moindres carrés.22Il s’agit de l’orbite de la comète 1844 III, désignée ‘‘C/1844 Y1’’ depuis 1995; pour les détails de son observation voir Kronk 2003, 145). Bond a calculé son orbite d’après 138 observations réalisées entre le 24.12.1844 et le 12.03.1845 (Bond 1850). En refaisant le calcul de Bond, Fayet a identifié une erreur de signe (Fayet 1906, 117). Tout calcul fait, l’orbite la plus probable est légèrement elliptique de sorte qu’il n’existe plus une seule comète que l’on puisse invoquer comme argument pour regarder ces astres comme étrangers au système solaire.

Le travail de M. Fayet a exigé beaucoup d’habileté et de ténacité ; l’auteur y a fait preuve de connaissances étendues et nous estimons qu’il y a lieu de l’autoriser à soutenir sa thèse.33Fayet soutiendra sa thèse le 29.06.1906, devant Poincaré (président du jury), Gabriel Kœnigs et Henri Andoyer (Fayet 1906).

Poincaré

ADS. AJ/16/5539, Archives nationales françaises.

Références

Titre
H. Poincaré: Rapport sur la thèse de Fayet
Incipit
La plupart des comètes connues ...
Date
1906-06-27
Cote (dans les archives)
AJ/16/5539
Type
ADS
Langue
fr