LettreHenri Poincaré à Eugénie Poincaré - janvier 1874

[Janvier 1874]

Ma bonne mère,

Je suis sorti mardi par le temps le plus épouvantable qu’on puisse imaginer ; nous avons été le soir à Cluny1 où j’ai vu Frédérick Lemaître dans le Crime de Faverne2. La pièce n’a rien de transcendant quoique très supportable. Mais Frédérick est épatant ; il fait le fou très dignement. Du reste, tout se passe avec calme ; il n’y a que deux types qui meurent sur la scène et un qui devient fou ; hier j’ai été au Louvre avec 3 cocons ; puis au Holl* ; puis je suis retourné sur le boul Mich [boulevard Saint-Michel] pour dîner chez Briot dans la savante société de MM. Briot3, Debray4, Vacquant5, Mascart6 plus Mlle Vacquant, Mme Briot et ses enfants, et un cocon de salle de Briot, Marié7 qui est le fils du chef de traction du chemin de fer de Lyon ; qui a fait l’ascension du Mont Rose et tenté celle du Mont Blanc.

J’ai reçu mes photos ; j’ai 2.13 et 1.11 en épure ; inutile de dire que c’est la meilleure qui a 11. Cela fait 12. 1/3.

Dernières nouvelles – 1.14 et 1.13. Cela fait 12,8.

 


  1. Il s’agit du Théâtre de Cluny, une salle de spectacle du boulevard Saint-Germain.

  2. Le Crime de Faverne est un drame de Théodore Barrière et Léon Beauvallet [T. Barrière & L. Beauvallet 1868] qui avait été créé le 6 février 1868 au Théâtre de l’Ambigu-Comique. Frédérick Lemaître (1800-1876), qui y jouait le rôle de Maître Séraphin dès la première représentation, était un acteur très célèbre. Il avait connu le succès dans des drames romantiques tels que Ruys Blas de Victor Hugo. Lemaître était devenu l’un des acteurs les plus connus du boulevard du crime, nom donné alors au boulevard du Temple en raison des nombreux théâtres qui y représentaient des crimes chaque soir (le Théâtre lyrique, le Théâtre de la Gaîté, etc.).

  3. Poincaré raconte ici une soirée passée chez le mathématicien Charles Briot, à l’invitation de son fils Louis Albert, qui était son camarade de promotion.

  4. Il est difficile de savoir si Poincaré fait ici référence à son camarade de promotion Paul Albert Debray ou à son père Charles Albert, qui était examinateur d’admission à l’École polytechnique.

  5. Originaire des Ardennes et fils d’agriculteur Eugène Charles Vacquant était né en 1853. Il devait mourir lors de sa première année d’étude à l’École polytechnique, le 3 mai 1874. Dans ses lettres, Poincaré revient d’ailleurs à plusieurs reprises sur son décès [Registres des étudiants de l’École polytechnique 2016].

  6. Le physicien Éleuthère Mascart était le gendre de Charles Briot.

  7. Pierre Paul Georges Marié, camarade de promotion de Poincaré.

Titre
Henri Poincaré à Eugénie Poincaré - janvier 1874
Incipit
Je suis sorti mardi par le temps le plus épouvantable qu'on puisse imaginer ...
Date
1874-01
Identifiant
L1874-01j-HP_EP
Adresse
Nancy
Lieu
Paris
Sujet
fr Colles et examens (polytechnique)
fr Visites familiales et amicales
fr Théâtre et opéra
Lieu d’archivage
Private collection 75017
Type
fr Lettre autographe signée
Section (dans le livre)
2
Droits
Archives Henri Poincaré
Nombre de pages
2
Mots d'argot polytechnicien cités
Cocon
Holl
Salles
Numéro
035
Langue
fr
Oeuvres citées
Le Crime de Faverne
Éditeur
Archives Henri Poincaré
Laurent Rollet
Licence
CC BY-ND 4.0

« Henri Poincaré à Eugénie Poincaré - Janvier 1874 ». La Correspondance De Jeunesse d’Henri Poincaré : Les années De Formation, De l’École Polytechnique à l’École Des Mines (1873-1878). Archives Henri Poincaré, s. d, Archives Henri Poincaré, s. d, La correspondance d'Henri Poincaré, consulté le 25 avril 2024, https://henripoincare.fr/s/correspondance/item/4110